11 janvier 2007

Où il sera question de l'Etat (1)



La société et l'économie vont se mondialisant. Par le biais des échanges, des transferts de capitaux et d'activités ; par le biais aussi des migrations, des médias, des réseaux de communication et de transport.

Nos connaissances, nos objets, nos outils, nos modes, nos pratiques sociales et culturelles viennent et vont dans le monde entier, selon un mouvement complexe de diffusion, qui est parfois de banalisation et d'homogénéisation mais qui est, plus souvent encore, de diversification des choix offerts.

A maints égards, nos modes de vie, de penser et de faire se rapprochent, moins parce qu'ils seraient façonnés, de façon autoritaire, par l'utilisation des mêmes technologies, la perception des mêmes images, la connaissance des mêmes nouvelles, que parce qu'ils s'insèrent progressivement au sein d'une même société-monde, étendue aux cinq continents, dans laquelle tout devient accessible à tous. L'économie n'est pas en reste, formant système à l'échelle de la planète, y tissant des réseaux et des circuits toujours plus grands et plus denses, dans un mouvement d'intégration-globalisation toujours plus poussé.

C'est de plus en plus indépendamment des logiques ou stratégies nationales que sont prises les décisions qui engagent notre vie, que sont opérés les choix qui régissent notre avenir. Non que les pouvoirs ne s'exercent plus à partir d'un lieu, mais parce qu'ils se multiplient, chacun d'entre eux ayant ainsi tendance à voir faiblir son influence, que la probabilité qu'ils se situent en dehors de nos frontières s'accroît avec le temps, et qu'en tout état de cause, où qu'ils soient, c'est de moins en moins en fonction des intérêts nationaux qu'ils prennent position ou agissent. La décision devient hors sol, comme on le dit de certaines formes d'agriculture, sa nature étant progressivement déliée de son lieu de production, quand celui-ci subsiste.

La notion de territoire perd progressivement substance. Nous avons un cadre de vie, mais à ce cadre qui nous est donné, s'ajoutent désormais des ouvertures sur le lointain, l'ailleurs, l'étranger, qui brisent l'unité initiale, l'homogénéité d'antan. La proximité n'est plus le fondement de la familiarité, ni la distance celui de la différence ou de l'indifférence. Non que rien de ce qui est humain ne nous soit désormais étranger mais parce le sentiment de solidarité, la sympathie, la proximité des esprits cheminent désormais le long de réseaux divers, au gré de courants changeants qui donnent à la circulation de l'information, de la culture, de la mode, de la technique, les allures d'une percolation.

Nous ne savons pas tout ce qui se passe à la surface du globe, il s'en faut, mais aucune logique de proximité ne fonde désormais plus la connaissance que nous avons du monde et des choses. L'étranger et le neuf peut désormais surgir au centre d'un territoire, sans avoir d'abord irrigué les régions alentours, par la grâce d'un cable, d'une ligne téléphonique ou d'une voie de chemin de fer débouchant là. Le territoire n'est plus cet ensemble continu dont nous apprenions qu'il se développait par cercles concentriques le long des villes et des voies ; il est devenu un ensemble discret fait de parcelles juxtaposées dont chacune peut aujourd'hui prétendre être le centre. Mais le centre de quoi ? La terre est ronde, dépourvue de milieu et de périphérie ; nous commençons à nous en rendre compte.



(A suivre...)



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